Résumé de l’examen des principes relatifs aux coûts contractuels et de la politique sur la marge bénéficiaire du gouvernement du Canada

Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC) a fait appel à PricewaterhouseCoopers (PwC) afin d'examiner la méthodologie employée pour déterminer les prix contractuels en se basant sur les principes relatifs aux coûts contractuels du gouvernement du Canada et sur la politique sur la marge bénéficiaire de TPSGC. Les politiques s'appliquent à plusieurs types d'approvisionnement, mais elles sont particulièrement utiles dans le cadre de l'approvisionnement en matière de défense, ce sur quoi porte le présent examen. L'examen visait trois objectifs :

  1. cerner les problèmes liés aux principes relatifs aux coûts contractuels du gouvernement du Canada et à la politique sur la marge bénéficiaire de TPSGC
  2. formuler des recommandations quant à la manière dont le gouvernement du Canada peut résoudre ces problèmes
  3. formuler des recommandations sur un « cadre de gestion » précisant comment TPSGC peut gérer efficacement les risques entourant l'application de la politique à l'échelle du gouvernement

Plusieurs facteurs ont contribué au lancement de cet examen. Les directives actuelles du gouvernement du Canada ont été rédigées il y a plusieurs années et n'ont pas suivi l'évolution des processus d'approvisionnement à l'échelle nationale et internationale. L'approvisionnement à grande échelle tend à inclure de nouveaux modèles, comme la passation de contrats axés sur le rendement, qui permet de mesurer l'efficacité d'un contrat en analysant l'optimisation des ressources et le prix plutôt que les coûts et les bénéfices. L'initiative de maintien du gouvernement du Canada est le support à partir duquel la passation de contrats axés sur le rendement est étudiée en vue de sa mise en œuvre.

Plusieurs examens ont été réalisés précédemment, notamment une étude récente menée par l'Association des industries canadiennes de défense et de sécurité (AICDS), qui a formulé plusieurs observations et recommandations. Cette étude constitue un fondement au présent examen.

L'examen comprend :

Cet examen a été entrepris à titre de projet dans le cadre de l'initiative de maintien interministérielle. L'initiative de maintien vise à harmoniser les intérêts du gouvernement du Canada et de l'industrie afin d'optimiser les ressources et le rendement en ce qui a trait au maintien du matériel militaire et aux programmes d'ingénierie. L'examen a tenu compte des objectifs de l'initiative de maintien et du mandat de la ministre de moderniser les pratiques d'approvisionnement. Les actions déjà entreprises en ce sens ont aussi été prises en considération.

Mandat de Services publics et Approvisionnement Canada

Cet examen a été lancé avant l'élection générale de 2015 et s'est conclu après celle-ci. Le 13 novembre 2015, les ministres chargés de ministères ont reçu les lettres de mandat identifiant les nouveaux ministères et précisant les objectifs des politiques. TPSGC porte désormais le nom de Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC). Cet examen et les recommandations formulées sont étroitement liés à l'une des priorités énoncées dans la lettre de mandat de SPAC :

« Moderniser les pratiques en matière d'approvisionnement de façon à ce qu'elles soient plus simples et moins lourdes sur le plan administratif, mettre en œuvre un contrôle moderne et adopter des pratiques qui appuient les objectifs de notre politique économique, y compris l'approvisionnement écologique et social. »

Il ne fait donc aucun doute que les plus hautes instances du gouvernement appuient les modifications relatives au contenu ou à l'application des directives. De plus, pour que le ministre de la Défense nationale puisse remplir son mandat, y compris la coordination de l'appel d'offres en vue du remplacement des chasseurs CF18 et de la Stratégie nationale en matière de construction navale avec SPAC, le recours à de nouvelles pratiques sera nécessaire.

Les directives et leur application

L'examen a permis de recenser un certain nombre de thèmes récurrents liés aux directives actuelles et à leur application. Ces thèmes émanent du gouvernement et de l'industrie. L'examen a également permis de souligner certains problèmes d'application. La structure du gouvernement a même été considérée comme un facteur négatif, notamment le fait que plus d'un ministère au sein du gouvernement du Canada intervient dans le processus d'approvisionnement en matière de défense (contrairement aux autres pays étudiés, qui n'ont qu'un ministère ou une personne responsable). En ce qui concerne les directives écrites, les parties intéressées ont convenu que les règles relatives aux coûts admissibles contenues dans les CCUA 1031-2 sont raisonnables et ne nécessitent que quelques modifications mineures pour en préciser le sens. Les principaux problèmes sont liés à la base de calcul du taux de profit présentée dans le Guide des approvisionnements, qui est perçue comme trop stricte et normative dans son contenu et son application. Plus précisément, les plages de taux de profit prévues ne sont liées à aucune information sur le marché (comme c'est le cas au Royaume-Uni) et sont perçues comme arbitraires. De plus, le mécanisme n'est pas suffisamment sophistiqué pour reconnaître et récompenser le transfert des risques commerciaux et techniques, alors que cela pourrait être un avantage pour le gouvernement. Par conséquent, l'industrie « manipule » les directives fournies (ce qui est compréhensible) et n'a pas intérêt à faire des investissements axés sur la valeur et à réduire les prix. Les formes contractuelles offertes lient les bénéfices et les coûts, ce qui dans certains cas incite l'industrie à gonfler les coûts. Les directives n'atténuent pas cet inconvénient par des mesures incitatives, des mécanismes de partage des dépassements de coût et de participation aux bénéfices, ou la validation technique des coûts estimés et des coûts engagés. Lors de la validation technique des solutions, on ne fait habituellement pas appel à des spécialistes de l'industrie militaire en mesure d'établir le prix des devis du gouvernement, à l'instar de l'industrie, de déterminer un coût théorique à partir des coûts proposés par les soumissionnaires et d'évaluer l'efficacité des marchés conclus avec la chaîne d'approvisionnement. Par conséquent, le gouvernement du Canada compte sur les soumissionnaires pour fournir les coûts et les ressources techniques, sans examen approfondi et impartial.

Les règles actuelles ne fournissent pas de lignes directrices quant au recours à la passation de contrats axés sur le rendement, qui est de plus en plus utilisée au Royaume-Uni et en Australie. La passation de contrats axés sur le rendement ne tient pas compte des bénéfices, mais plutôt du prix, de la valeur et des mesures incitatives. En ce qui a trait à l'application, il est reconnu que les directives devraient être fondées sur des principes afin de laisser une certaine place à l'interprétation. Il a été mentionné que les intervenantsNote de bas de page 1 pourraient bénéficier d'un manuel d'application (le manuel Procedures Guidance and Information [PGI] du gouvernement américain a été cité en exemple) afin d'assurer la cohérence des résultats. À l'heure actuelle, les projets individuels peuvent être traités de manière très différente.

Analyse comparative des pratiques d'approvisionnement en matière de défense aux États-Unis, en Australie et au Royaume-Uni

L'examen comprend une évaluation des directives écrites dans des pays similaires et une consultation auprès des intervenants de ces pays. Bien que la documentation et le langage varient, les principes liés aux coûts admissibles sont similaires et peuvent s'appliquer aux marchés à fournisseur unique et aux marchés avec appel d'offres. Une différence notable entre les pays est l'application des marchés à prix fixe. Dans les pays étudiés, les prix fixes sont négociés en fonction d'un examen rigoureux des coûts standards. Au Canada, le processus est moins strict. Les prix sont toutefois ajustés au terme du contrat, de sorte que les bénéfices excédant le niveau négocié sont récupérés. Une autre différence notable est le calcul du taux de profit. Au Royaume-Uni, le taux de profit est calculé à partir d'un échantillon du marché et est ajusté par rapport à cet échantillon, en suivant un ordre logique permettant de reconnaître le transfert de risques au niveau de la passation de contrats axés sur le rendement. En Australie, il n'y a aucune directive sur les bénéfices. L'accent est plutôt entièrement mis sur la passation de contrats axés sur le rendement, où la valeur fait constamment l'objet de mesures incitatives par l'application d'indicateurs de rendement clé en fonction d'un prix convenu. Aux États-Unis, les directives sont détaillées et les taux de profit sont définis en fonction du type de contrat. L'agent de négociation des contrats d'achat dispose toutefois d'une certaine latitude quant à l'application des directives. Les États-Unis et le Royaume-Uni ont des mécanismes clairs en ce qui a trait aux mesures incitatives; ces mesures ne visent pas qu'à respecter les exigences de base, comme cela semble parfois être le cas au Canada. En Australie, les mesures incitatives sont gérées par un indicateur de rendement clé supérieur à 100 %, puis sont monétisées. Au Royaume-Uni, les mesures incitatives sont liées à un besoin précis, comme l'exécution avant le délai prévu.

Elles se distinguent aussi considérablement du point de vue de la structure et de l'application. Dans les pays étudiés, la responsabilité et la prise de décision incombent à un seul ministère, comme c'est le cas au Royaume-Uni (Defence Equipment and Support) et en Australie (Capability, Acquisition and Sustainment Group), ou à une seule personne, comme c'est le cas aux États-Unis (agent de négociation des contrats d'achat). En outre, d'autres différences particulières existent, comme le recours, au Royaume-Uni, à un organisme de réglementation indépendant (Single Source Regulations Office [SSRO]) pour statuer sur les litiges et fournir des rapports de conformité à la demande du gouvernement ou de l'industrie. Le Royaume-Uni et l'Australie ont recours aux partenariats public-privé (PPP) pour les solutions de défense (les PPP sont utilisés au Canada, mais pas dans le secteur de la défense) et des directives pouvant s'adapter à ce modèle d'exécution (qui constitue une forme avancée de passation de contrats axés sur le rendement) ont toujours été nécessaires. Pour que le Canada puisse avoir recours à différents modèles d'exécution dans le secteur de la défense, les directives doivent être modifiées afin de couvrir ces structures contractuelles.

Pratiques d'approvisionnement dans d'autres secteurs

L'examen s'est intéressé à la façon dont les solutions capitalistiques sont achetées dans d'autres secteurs au Canada et dans les pays examinés. Dans de nombreux cas, ces solutions sont exposées à un marché étroit au cours du processus d'approvisionnement; même si un appel d'offres est possible à une certaine étape, il est probable que le processus aboutisse à un contrat à fournisseur unique. Dans tous les cas, le principal objectif consiste à garantir que les biens et services ultimement acquis permettent d'optimiser les ressources et sont abordables. Parmi les stratégies permettant d'atteindre cet objectif, notons la mise en place d'un comparateur du secteur public ou l'évaluation d'un coût théorique, soit la réponse chiffrée du gouvernement par rapport au devis qui permet de vérifier les réponses des fournisseurs. Une autre méthode courante consiste à lancer un appel d'offres pour un contrat initial au moyen d'un projet modèle, de choisir un entrepreneur, puis de le lier aux taux du projet modèle pour les contrats futurs. Une variante possible à cette méthode consiste à avoir recours à l'entrepreneur à titre d'agent aux achats et de prévoir des mesures incitatives pour l'obtention de contrats à l'avenir. Le partage des recettes des tierces parties par la vente de la capacité excédentaire à des parties qui ne sont pas liées au contrat est aussi fréquemment utilisé dans d'autres secteurs et pays. Cette méthode peut aider à gérer une demande variable. Prenons par exemple le Royaume-Uni, qui vend sa capacité de transport aérien de charges lourdes à ses alliés, comme c'est le cas avec le PPP pour le transport stratégique futur.

Le principal objectif de tout processus d'approvisionnement complexe est de maintenir l'intérêt du marché. Cela est dû au fait que les secteurs spécifiques comme l'énergie, les transports, les soins de santé et la défense sont des secteurs consolidés ayant des marchés étroits. Il est important d'ajuster l'offre en se basant sur une étude de commercialisation. Cela permet de garantir le respect des devis à un prix permettant de conclure une entente en fonction du prix indiqué dans la soumission sans négociations importantes. Cette méthode a pour avantages de maintenir l'intérêt du marché et de permettre aux fournisseurs d'investir dans des propositions réfléchies et concurrentielles, ce qui est essentiel compte tenu du risque transféré dans ce type de contrats. Au fil du processus d'approvisionnement, des devis précis et une orientation claire sont primordiaux. De plus, l'autorité doit faire preuve de professionnalisme. Si le processus d'approvisionnement aboutit à un marché à fournisseur unique, un coût théorique s'avère très utile pour examiner les propositions. Pour ce faire, l'autorité doit avoir une bonne compréhension de l'industrie militaire pour que ses évaluations soient fiables.

Recommandations

Des recommandations ont été formulées en fonction des conclusions dans chaque domaine. Nous convenons que les recommandations sont d'ordre général et qu'elles pourraient être divisées en groupes de mesures distinctes, mais cette façon de procéder est intentionnelle, ce rapport visant à établir une orientation. Nous présentons les recommandations suivantes pour examen :

  1. Certains termes utilisés dans les CCUA 1031-2 devraient être modifiés et des instructions plus précises devraient être données relativement à l'application
  2. Le Guide des approvisionnements nécessite des modifications importantes afin de remédier à certaines lacunes
  3. Un manuel d'application devrait être créé pour aider les intervenants au sein du gouvernement
  4. Le gouvernement doit accroître son accès au soutien de spécialistes de l'industrie militaire
  5. Les intervenants doivent reconnaître les limites des directives et envisager des solutions de rechangeNote de bas de page 2
  6. Un protocole visant à améliorer la coordination entre les ministères devrait être élaboré
  7. Un cadre de gestion est requis pour la passation de contrats à fournisseur unique; ce cadre pourrait inclure le recours à un organisme de réglementation

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